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Cryptozoologie
 

   

Systématique, "fossiles vivants" et cryptozoologie

(dernière mise à jour : 14 juin 1998)

 
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Si la découverte d'espèces nouvelles de grande taille est bien sûr du plus haut intérêt pour la cryptozoologie en raison de leur caractère spectaculaire (d'autant plus que la plupart d'entre elles ont été découvertes selon un processus typiquement cryptozoologique), celle de certaines espèces de taille plus modeste n'en est pas moins importante d'un point de vue cryptozoologique :
- soit qu'il s'agisse d'une espèce nouvelle dont les caractères anatomiques diffèrent tellement des espèces voisines connues, qu'elles nécessitent de créer un nouveau groupe zoologique spécialement pour elle.
- soit que cette nouvelle espèce appartienne à un groupe connu à l'état fossile seulement, tenu pour éteint depuis des temps géologiques, et constitue dès lors un "fossile vivant".

Des espèces nouvelles à tous égards

Certaines espèces nouvelles nécessitent la création d'un genre nouveau, ce qui est relativement banal. D'autres présentent des caractéristiques si radicalement différentes des espèces proches connues, qu'elles justifient la création d'un groupe nouveau encore plus élevé dans la hiérarchie zoologique : famille, ordre, classe, voire embranchement et même un phylum (grand plan d'organisation).

 

  • En 1946, Vampyroteuthis infernalis, un mollusque céphalopode présentant des caractères de deux ordres actuels (les octopodes ou poulpes et les décapodes ou calmars) fit l'objet de la création de l'ordre des vampyromorphes (Pickford 1946) .

  • En 1976, c'est un requin inconnu de 4,50 m de long qui est pêché au large d'Hawaii. Décrit 7 ans plus tard sous le nom de Megachasma pelagios (Taylor et al. 1983), ce squale mangeur de plancton a donné lieu à la création d'une nouvelle famille de sélaciens, les mégachasmidés.

  • En 1978, on captura en Australie un insecte orthoptère qui présentait des caractères de trois familles d'insectes. Surnommé d'emblée "Cooloola monster" (monstre de Cooloola), il fut proprement baptisé Cooloola propator (Rentz 1980) et fit l'objet de la création d'une nouvelle famille d'insectes.

  • En 1980, la découverte au large de l'Afrique du Sud d'une nouvelle raie, Hexatrygon bickelli, possédant six fentes branchiales alors que les autres raies n'en ont que cinq, nécessita la création d'un nouveau sous-ordres de poissons.

  • En 1983, une minuscule araignée, Micromygale diblemma, fut décrite du Panama, pour laquelle fut créée une nouvelle sous-famille d'arachnides : elle était en effet dépourvue de poumons (respirant à travers la peau) et ne possédait que deux yeux, d'où son nom spécifique (diblemma signifie "à deux yeux"), alors que les araignées en ont 6 ou 8.

  • En 1986, une nouvelle classe d'échinodermes, les concentricycloidés, est créée par Baker et ses collègues, pour une sorte d'étoile de mer circulaire aberrante (Xyloplax medusiformis) des eaux néo-zélandaises.

  • En 1995, un nouveau phylum (Cycliophora) est spécialement créé pour un invertébré marin microscopique (Symbion pandora), découvert dans la gueule d'un homard (Funch and Kristensen 1995).

 

Fossiles vivants

Il arrive parfois qu'une espèce nouvelle appartienne à un groupe zoologique inconnu de la faune actuelle, mais déjà connu à l'état fossile, et considéré jusqu'alors comme éteint depuis des temps géologiques. Dans ce cas, il ne s'agit donc pas de la création d'un groupe nouveau, mais de sa persistance jusqu'à nos jours, au prix d'importants remaniements de la classification zoologique.

  • En 1938, un poisson aux nageoires pédonculées, long de près de 1,50 m, fut pêché au large de l'Afrique du Sud. Le professeur J. L. B. Smith, qui le décrivit l'année suivante dans Nature sous le nom de Latimeria chalumnae (Smith 1939), l'identifia comme étant un coelacanthe, c'est-à-dire un représentant attardé de l'ordre présumé fossile des crossoptérygiens, tenu pour éteint depuis près de 70 millions d'années.

  • En 1952, un petit mollusque à coquille conique fut pêché au large du Mexique par le navire océanographique danois Galathea. L'étude révéla que cette nouvelle espèce de mollusque, baptisée Neopilina galatheae (Lemche 1952), appartenait à la classe des monoplacophores, qu'on croyait éteinte depuis près de 280 millions d'années.

  • En 1957, c'est dans le détroit de Long Island, en face New York, qu'on a découvert un crustacé primitif,Hutchinsoniella macracantha (Sanders 1957), rappelant les trilobites de l'ère primaire : il a fallu créer spécialement pour lui une nouvelle sous-classe de crustacés, les céphalocarides.

  • En 1975, deux spécialistes des crustacés du Muséum National d'Histoire Naturelle de Paris découvrirent une sorte de crevette inconnue dans les collections de la Smithsonian Institution à Washington. Elle avait été pêchée par le navire océanographique Albatross au large des Philippines en 1908. Il s'avéra que ce crustacé appartenait à la famille des glyphéidés, présumée disparue depuis l'éocène, soit quelque 50 millions d'années, justifiant ainsi son nom scientifique de Neoglyphea inopinata (Forest et Saint-Laurent 1975).

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On remarquera que les principaux cas de découvertes récentes de "fossiles vivants" viennent des océans. Cette donnée s'explique surtout par le fait que les océans sont un milieu stable, conservateur, favorable à la permanence de formes anciennes. C'est également un milieu où l'homme est un intrus, et dont nous ne connaissons probablement qu'une faible part de la faune.

En conclusion, que peut-on affirmer de manière catégorique, preuves à l'appui ?
1) on décrit encore de nos jours des espèces nouvelles à un rythme toujours très soutenu.
2) on décrit encore de nos jours des espèces de taille moyenne ou grande.
3) la plupart des espèces de taille moyenne ou grande nouvellement décrites étaient déjà connues des indigènes.
4) il arrive que le processus de découverte prenne des années, des décennies, et parfois des siècles.
5) certaines espèces nouvelles nécessitent la création d'un groupe particulier, parfois jusqu'aux plus hauts niveaux de la hiérarchie zoologique.
6) certaines espèces nouvelles, véritables "fossiles vivants", démontrent la survivance actuelle de groupes zoologiques jusqu'alors considérés comme éteints.
Ces six affirmations ne devraient même pas prêter à discussion : ce ne sont pas des postulats, car elles sont basées sur des faits vérifiables. Elles permettent d'établir sur des bases scientifiques solides la pertinence de la recherche cryptozoologique.

 

Références citées

BAKER, Alan N., Francis W. E. ROWE, and Helen E. S. CLARK
1986 A new class of Echinodermata from New Zealand. Nature, 321 : 862-864 (June 26).

FOREST, Jacques, et Michèle de SAINT-LAURENT
1975 Présence dans la faune actuelle d'un représentant du groupe mésozoïque des Glyphéides : Neoglyphea inopinata, gen. nov., sp. nov. (Crustacea, Decapoda, Glypheidae). Comptes-Rendus de l'Académie des Sciences, série D, 281 : 155-158 (21 juillet).
1976 Capture aux Philippines de nouveaux exemplaires de Neoglyphea inopinata (Crustacea, Decapoda, Glypheidae). Comptes-Rendus de l'Académie des Sciences, série D, 283 : 935-938 (11 octobre).

FUNCH, Peter, and Reinhardt M. KRISTENSEN
1995 Cycliophora is a new phylum with affinities to Entoprocta and Ectoprocta. Nature, 378 : 711-714.

LEMCHE, Henning
1957 A new living deep-sea mollusc of the cambro-devonian class monoplacophora. Nature, 179 : 413-416 (February 23).

RENTZ, D. C. F.
1980 A new family of ensiferous Orthoptera from the coastal sands of south-east Queensland. Memoirs of the Queensland Museum, 20
[n° 1] : 49-63.
1987. Considerations in naming a family : the Orthoptera family Cooloolidae. In: Baccetti B. M., Evolutionary Biology of Orthopteroid Insects, Chichester, Ellis Horwood Ltd. : 433-437.
1991. Orthoptera. In: CSIRO, The Insects of Australia, 1, 2nd edition, Melbourne, Melbourne University Press.

SANDERS, Howard L.
1957 The cephalocarida, a subclass of crustacea from Long Island Sound. Proceedings of the National Academy of Science, 41 : 61-66.

SMITH, J. L. B.
1939 A living fish of mesozoic time. Nature, 143 [n° 3620] : 455-456 (March 18).

TAYLOR, R. Leighton, L. J. V. COMPAGNO and Paul J. STRUHSAKER
1983 Megamouth -- A new species, genus, and family of lamnoid shark (Megachasma pelagios, family Megachasmidae) from the Hawaiian Islands. Proceedings of the California Academy of Sciences, 43 [n° 8] : 87-110.

 

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