Institut Virtuel
de
Cryptozoologie

   

Biodiversité et cryptozoologie :
Batraciens (Amphibia)

(dernière mise à jour : 23 août 2002)

 

Nombre d'espèces :

    Le nombre d'espèces connues  de batraciens à la fin du vingtième siècle dépasse largement les 4000. La liste exhaustive de toutes les espèces connues dans l'ouvrage de référence Amphibian species of the world (Frost 1985) est de 4014 bonnes espèces. Une mise à jour de cette liste 8 ans plus tard (Duellman 1993), fait apparaître un total de 4522 bonnes espèces.
    Des estimations encore plus récentes par d'autres auteurs donnent 4680 espèces (Pough et al. 1998), probablement un peu inférieures à la réalité, si l'on en juge par la nette accélération du nombre des découvertes ces dernières années. En somme, on connaît autour de l'an 2000 presque autant de batraciens que de mammifères, et plus d'une fois et demi plus de reptiles que de batraciens.

 

Vitesse de découverte :

    L'inventaire des batraciens depuis Linné en 1758 jusqu'en 1984 (d'après les données de Frost 1985) fait apparaître une progression assez constante du nombre d'espèces connues depuis 1830 environ (figure 1), démontrant que l'inventaire de cette classe de vertébrés est loin d'être terminé.


Figure 1 :

progression de l'inventaire batrachologique de 1758 à 1985.

 

     Le nombre d'espèces décrites par décennies (figure 2) est en effet de l'ordre de 200 de 1850 à 1960, avec une nette tendance à l'augmentation depuis lors : 40 à 50 espèces par an en moyenne de 1960 à 1984.


Figure 2 : nombre de bonnes espèces de batraciens décrites par décennie.

    Selon Bauer (1997-1998), cette tendance a été confirmée au cours de la décennie 1980-1989, puisqu'on a décrit une moyenne de 40 espèces nouvelles par an (surtout des grenouilles et des crapauds), à comparer avec l'estimation faite par Bernard Heuvelmans (1983) d'une dizaine de batraciens par an pour la seconde moitié du vingtième siècle -- on constate ici un écart assez important, qui s'explique par la relative désaffection de cette classe de vertébrés par les systématiciens jusqu'à une date récente. Avec ce rythme de découverte particulièrement élevé, le nombre d'espèces connues de batraciens devrait même dépasser celui des mammifères d'ici une trentaine d'années.

 

Quelques découvertes significatives

    Parmi les centaines de nouveaux batraciens découverts au cours des dernières décennies, il en est quelques-uns qui méritent une mention particulière pour leurs caractéristiques sortant du commun :

  • Ascaphus truei est une grenouille à queue d'Amérique du Nord, décrite en 1899, qui possède un semblant de queue, une singularité parmi des batraciens qui en sont justement privés, et appelés de ce fait anoures. Il s'agit en fait d'un prolongement des lèvres du cloaque, permettant ainsi au mâle de pratiquer une fécondation interne, encore une singularité chez les batraciens, chez qui la fécondation est généralement externe (à l'exception des céciliens et gymniophones).
  • Chrysobatrachus cupreonitens est une grenouille aux reflets cuivrés métalliques, auxquels elle doit son nom spécifique, récoltée en 1951 par Raymond Laurent dans les montagnes de l'est du Congo belge de l'époque. La femelle est beaucoup plus grosse que le mâle, au point que celui-ci doit la ceinturer à hauteur de la taille au lieu des aisselles comme d'habitude.
  • Les deux grenouilles Rheobatrachus silus et R. vitellinus, décrites respectivement en 1973 et 1984, sont plus étonnantes encore que les rhinodermes chez qui les mâles couvent les œufs dans leurs sac vocaux : les Rheobatrachus avalent carrément leurs œufs, qui se développent alors dans leur estomac ! La fonction digestive est suspendue jusqu'à la naissance des têtards.
  • La grenouille Arenophryna rotunda, découverte en 1976, est de mœurs fouisseuses, se dissimulant dans le sable et la vase des plages de l'ouest australien.
  • Enfin, on peut noter que même nos régions peuvent encore nous réserver des surprises, comme cela a été démontré en 1993, avec la description d'une nouvelle espèce de grenouille des Pyrénées espagnoles, Rana pyrenaica (Serra-Cobo 1993).

    La classe des batraciens a aussi fourni quelques vrais géants au cours du vingtième siècle.
    A la fin du dix-neuvième siècle, le missionnaire et naturaliste britannique George Latimer Bates captura à Efulen (Cameroun) une grenouille au dos brun et au ventre jaunâtre, dont le corps mesurait pas moins de 10 pouces (25 cm) de long, en faisant le champion de taille de ce groupe de batraciens (anoures). Cette nouvelle espèce fut décrite sous le nom de Rana goliath par George A. Boulenger en 1906, mais des études ultérieures montrèrent qu'elle différait suffisamment du genre Rana pour créer un nouveau genre, de sorte que cet animal est désormais connu sous le nom de Conraua goliath.
    Depuis lors, des spécimens encore plus gros de cette espèce ont été enregistrés. En 1960, le naturaliste espagnol Jorge Sabater Pi et son assistant ont capturé une femelle (figure 3) dans le Rio Muni, pesant 3,3 kg et dont la longueur museau cloaque (snout-vent length = SVL) atteignait 30 cm, pour une longueur totale, pattes postérieures en extension, de plus de 80 cm ! Avec de telles dimensions, la grenouille goliath rivalise avec les plus petites antilopes, comme le dik-dik (figure 4). Le régime alimentaire de cet énorme batracien est essentiellement insectivore, mais il lui arrive parfois d'engloutir des petits rongeurs ou d'autres batraciens.


Figure 3 : Conraoua goliath
(d'après Pi 1965)

Figure 4 : Conraoua goliath et antilope dik-dik.

 

    En 1950, John Funkhouser, de l'université de Stanford (Californie), apprit de son ami Rolf Blomberg, résidant à Quito en Equateur, que d'énormes crapauds vivaient dans la région de Nachao (Colombie). Fasciné par la possibilité de découvrir ainsi une nouvelle espèce, Funkhouser partit presque aussitôt pour cette région, où il collecta en effet un de ces batraciens géants en septembre 1950. Avec 207 mm de long et un poids de 1 kg, c'était le plus grand des crapauds connus, et il s'agissait d'une espèce nouvelle, que Myers et Funkhouser (1951) décrivirent l'année suivante sous le nom de Bufo blombergi. L'espèce, outre sa taille, se caractérise par une bande noire séparant nettement le dessus de couleur cuivrée, du dessous brunâtre.

 

Cryptozoologie et batraciens

    Bernard Heuvelmans (1986) ne listait aucun batracien dans sa checklist des quelque 140 formes animales apparemment inconnues relevant de la cryptozoologie. Même en enrichissant cette liste (Shuker 1998), on ne compte guère qu'une poignée de dossiers cryptozoologiques concernant un batracien, et tout spécialement :

  • Une sorte de salamandre de 1,50 à 3 m de long, signalée dans des lacs et cours d'eau de Californie (Trinity Alps, Sacramento River, etc.) (Myers 1951, Rodgers 1962, Bergier 1972, Coleman 1989).
  • Un batracien inconnu du nord-est des USA (Shuker 1998).
  • Un grand batracien des vallées andines du Chili et du Pérou, connu sous le nom de sapo de loma ("crapaud des collines") (Shuker 1998).

    Cette quasi-absence des batraciens dans la cryptozoologie, où ils ne représentent que 1% de l'ensemble des dossiers sur les vertébrés (alors qu'ils comptent pour 8% des espèces recensées), est en fait très compréhensible. A quelques exceptions près, les batraciens sont des animaux de petite taille, peu susceptibles d'attirer l'attention et de frapper l'imagination, et donc de laisser une trace dans la connaissance humaine (une condition préalable pour que l'on soit dans le champ de la cryptozoologie : l'animal doit être "connu", d'une manière ou d'une autre, avant sa découverte scientifique officielle). Par ailleurs, le fait que la plupart des cryptozoologues de formation zoologique, à commencer par Bernard Heuvelmans, soient des mammalogistes, a certainement introduit un biais statistique en faveur de ceux-ci.

 

Bibliographie

BAUER, Aaron M.
1997-1998 Twentieth century amphibian and reptile discoveries. Cryptozoology, 13 : 1-17.

BERGIER, Jacques, et le groupe INFO
1972 Le livre de l'inexplicable. Paris, Albin Michel : 185-188.

BOULENGER, George A.
1906 Descriptions of new batrachians discovered by Mr. G. L. Bates in South Cameroon. Annals and Magazine of Natural History, series 7, 17 : 317-323.

COLEMAN, Loren
1989 Tom Slick and the search for the yeti. Boston, Faber and Faber : 120-125.

DUELLMAN, William E.
1993 Amphibian species of the world : additions and corrections. Lawrence, The University of Kansas.

FROST, Darrel R.
1985 Amphibian species of the world. Lawrence, Allen Press and The Association of Systematics Collections.

GLAW, Frank, and Jörn KÖHLER
1998 Amphibian species diversity exceeds that of mammals. Herpetological Review, 29 [n° 1] : 11-12.

HEUVELMANS, Bernard
1983 How many animal species remain to be discovered ? Cryptozoology, 2 : 1-24.
1986 Annotated checklist of apparently unknown animals with which cryptozoology is concerned. Cryptozoology, 5 : 1-26.

MYERS, George S.
1951 Asiatic giant salamander caught in the Sacramento river, and an exotic skink near San Francisco. Copeia, n° 2 : 179-180 (June 08).

MYERS, George S., and John FUNKHOUSER
1951 A new toad from southwestern Colombia. Zoologica, 36 : 379-382.

PI, Jorge Sabater
1965 La mayor rana del mundo vive en nuestra provincia Africana de Rio Muni. Iberian Review of Science Newsletter.
1985 Contribution to the biology of the giant frog (Conraua goliath, Boulenger). Amphibia-Reptilia, 6 : 143-153.

POUGH, F. Harvey, Robin M. ANDREWS, John E. CADDLE, Martha L. CRUMP, Alan H. SAVITZKY, and Kentwood D. WELLS
1998 Herpetology. Upper Saddle River : Prentice Hall.

RODGERS, Thomas L.
1962 Report of giant salamander in California. Copeia, n° 3 : 646-647 (September 28).

SERRA-COBO, Jordi
1993 Descripcion de una nueva especie europea de rana parda (Amphibia, Anura, Ranidae). Alytes, 11 [nº 1] : 1-15.

SHUKER, Karl P. N.
1998 A supplement to Dr. Bernard Heuvelmans' checklist of cryptozoological animals. Fortean Studies, 5 : 208-229.

 



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 Bibliographie

 

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